Kinshasa - Boulevard du 30 Juin : Les "Champs Elysées" de la discorde
En République Démocratique du Congo, à Kinshasa, les travaux sur le Boulevard du 30 juin, la principale artère de la capitale, durent depuis plusieurs mois et ne font pas l’unanimité. Chef d’une équipe d’une dizaine d’ouvriers, Ferdinand Pongo est content de participer à la réhabilitation du Boulevard du 30 juin. Principal axe de circulation de la capitale.
"Là, on fait le coulage du béton, ce sont les maçons qui travaillent", explique Ferdinand Pongo, "vous savez, c’est bien pour notre pays, nous-mêmes, Congolais, on doit le faire progresser".
Le porte-parole de l’Agence Congolaise des Grands Travaux, Barnabé Milinganyo Wimana explique, quant à lui l’ambition derrière ce projet.
"Notre objectif, c’est de matérialiser la vision du chef de l’Etat ; le président Joseph Kabila veut << doter >> la capitale d’un boulevard à la dimension des Champs Elysées ou de la place Tiananmen de Pékin", annonce Barnabé Milinganyo Wimana.
"Quand vous arrivez au Congo, un pays de 2 345 000 km2, il faut avoir un boulevard de 12 à 15 km à la hauteur de notre pays, dans la capitale ; c’est la vision de notre chef d’Etat".
Un projet ambitieux mais une gestion critiquée
Vision de grandeur, travaux ambitieux, dont le contrat est revenu à une entreprise chinoise.
L’Agence des Grands Travaux n’est cependant pas en mesure de donner le budget final de ces travaux pour le moment, indiquant qu’il continue d’évoluer au fur et à mesure des travaux.
Mais sur le boulevard, nombre d’ouvriers se plaignent des conditions de travail.
"C’est vrai qu’avant on était chômeur", raconte l’un d’entre eux, "mais les Chinois nous traitent comme des animaux, on ne sait pas si c’est aussi la volonté du Président ; mais si tu es blessé, tu es renvoyé chez toi sans être soigné, par exemple, et on n’est pas non plus assuré, c’est regrettable".
"On travaille sans manger", réplique un autre ouvrier, "sans repos, pas même le dimanche, et pour nous c’est normalement le jour du repos et de l’église".
A l’ambassade de Chine, le conseiller économique, Wei Sheng Zi, estime que l’important est d’avoir pu offrir du travail.
"Les ouvriers locaux reçoivent leurs salaires, comme ils le souhaitent, les entreprises chinoises leur ont offert un travail bien meilleur que la moyenne des emplois, et c’est une grande chance pour les anciens chômeurs", affirme le conseiller.
Des travaux trop longs, responsables du déboisement
Autres sujets à controverse, la durée des travaux et l’abattage des arbres qui bordaient le boulevard.
Parmi les ouvriers comme les usagers, les avis divergent.
"Ce projet, ce n’est pas une mauvaise idée, mais les travaux n’évoluent pas comme prévu", rapporte un ouvrier, "et il y a des embouteillages partout car ces travaux durent depuis trop longtemps, ils auraient dû s’achever au mois de juin".
"Ce qui me gêne", explique une habitante du quartier, "c’est qu’on a aussi coupé les arbres du boulevard ; sans eux, on ne peut pas vivre, on en a enlevé trop, et ce déboisement est une grosse erreur".
Si l’Agence des Grands Travaux ne peut donner de date butoir pour la fin des travaux sur le boulevard, son porte-parole assure que des arbres seront replantés.
Selon Barnabé Milinganyo Wimana, "dans les différentes étapes du processus de modernisation du boulevard, il y a aussi l’aspect esthétique ; et on va donc replanter des arbres, mais surtout mettre des fleurs et des arbres moins gros que les manguiers".
Le gouvernement congolais a annoncé son intention de remettre en état un total de 250 km de routes, rues et avenues de la capitale, mais pour l’instant, les Kinois attendent toujours de voir les résultats de ces promesses.