Belgique-congo : mettre fin au combat des chefs
Comment dit-on « rastrins » en swahili, en lingala ou en néerlandais ? A Bruxelles ou à Kinshasa, il est temps de calmer le jeu, de ne plus s’enfermer dans un combat de chefs. Il ne peut que nuire à la population congolaise au nom de laquelle tout le monde prend position. Il risque de décourager les innombrables bonnes volontés qui, au Nord comme au Sud de la Belgique, s’activent dans des projets, des solidarités, des partages…
Car même si De Gucht devait avoir raison, avant tout le monde ou contre tout le monde, il n’est ni un prophète ni un évangéliste mais un politique. Et à ce titre, le fait d’obtenir les résultats inverses de ceux qu’il souhaite démontre qu’il a tort. Qu’il doit revenir sinon sur son jugement, du moins sur ses propos et son attitude, faire acte de souplesse et de diplomatie. Sinon, c’est la Belgique qui risque de se trouver isolée, sinon ridicule, dans sa position de donneuse de leçons universelle…
Quant au président Kabila, tout le monde a compris qu’il avait été blessé, humilié, en tant que personne, mais aussi dans les fonctions symboliques qu’il occupe. Il ne pouvait laisser passer l’offense, sous peine d’être accusé de faiblesse. Mais tout de même : on aimerait qu’il consacre autant d’énergie à mettre de l’ordre dans son entourage qu’à faire connaître son déplaisir aux Belges. Qu’il contraigne ses proches à cesser de se dénigrer les uns les autres. L’opinion le soutiendra si soudain il se décidait à écarter ou à faire traduire en justice des hommes dont tous citent les noms lorsqu’il s’agit de dessous de table, de contrats léonins, de combines politiques. Car s’il ne met pas d’ordre dans sa cour, il sera soupçonné d’avoir utilisé la crise avec la Belgique comme un dérivatif. Déjà utilisées du temps de Mobutu, de telles échappatoires sur fond de nationalisme n’avaient pas convaincu grand monde et la crise belgo-congolaise de 1989 avait marqué le début de la fin du régime. Aujourd’hui, la meilleure, la seule réponse qu’il faut apporter à De Gucht n’est pas de fermer les consulats, mais de démentir ses critiques avec des faits : payer les militaires, répondre à la crise alimentaire et énergétique, sanctionner corrompus et corrupteurs. Rendre l’espoir à une population désenchantée…
Le Soir