Infrastructures : la nostalgie de l’époque coloniale
Le Congo-Kinshasa n’est pas du tout différent d’un pays où tout, presque, marche à reculons. Bien évidemment, il en a les caractéristiques, si pas toutes. En quatre décennies et demie d’indépendance, il a montré combien il savait détruire tout ce qu’il a hérité de la colonisation. Notamment ses infrastructures de base. Triste record quand même pour un pays qui n’a plus de routes aujourd’hui.
Lorsque, le 30 juin 1960, il accède à l’indépendance, le Congo-Kinshasa peut se targuer de disposer d’importants atouts qui le font passer pour un pays promis à un bel avenir.
En fait, il sort de la colonisation belge une base suffisante qui lui permet d’assurer son développement économique et l’épanouissement de ses populations. C’est le cas, en effet, de ses infrastructures qui répondent, dans une certaine mesure, à la dimension et aux besoins d’un pays qui passe pour un sous-continent avec ses 2.345.000 km2 de superficie.
Des routes, il y en a presque partout à travers le Congo-Kinshasa qui vient ainsi de rejoindre le carré, de plus en plus grand, des pays indépendants sur le continent africain.
D’UN TABLEAU ENVIABLE…
Des routes aussi bien d’intérêt national que de desserte agricole. Au point qu’en 1960, la République démocratique du Congo peut être traversée de part en part par route. Le désenclavement apparaît à l’époque comme une notion étrangère aux Congolais. Cela est d’autant plus vrai que les provinces sont pratiquement reliées entre elles grâce à un réseau routier qui embrasse tout le territoire national. Même décor à l’intérieur des provinces où les centres urbains sont connectés aux campagnes, sans problèmes…
Pendant qu’on construit de nouvelles routes dans les milieux urbains et qu’on en ouvre d’autres dans les milieux ruraux, leur maintenance suit sans beaucoup trop de difficultés. A l’intérieur du pays notamment, tout ce travail se fait grâce à la magie du système de cantonnage. Un système qui arrose presque toute la République démocratique du Congo. « C’est avec beaucoup de dévouement et d’efficacité que les cantonniers assumaient leurs tâches, avec certes un matériel rudimentaire mais qui leur permettait d’assurer la maintenance de toutes nos routes », se souvient un administrateur de territoire aujourd’hui à la retraite, après avoir servi le pays de 1960 à 1980, dans la brousse.
Il se rappelle, avec beaucoup de nostalgie, qu’à cette époque, on pouvait aller, par route, de l’Ouest du pays à l’Est, du Nord au Sud, sans anicroches et en quelques heures de marche seulement. Il y en a qui le faisaient à bord de leurs coccinelles, les petites VW. « J’avais un ami, mécanicien chef à Sedec Motors – devenue plus tard ACA (Agence congolaise d’automobiles) – qui quittait Kinshasa, siège de l’entreprise, le vendredi et qui se retrouvait un ou deux jours après dans l’ex-Rwanda-Urundi par route, où cette société automobile avait un bureau de représentation », témoigne un ancien commerçant qui exerçait ses activités dans la commune de saint Jean (devenue Lingwala). Il ne s’agit pas d’une anecdote, mais bien d’une réalité…
De 1960 jusque fin des années 80, la situation est restée bonne. Aux anciens ouvrages s’ajoutaient de nouveaux. Des ponts étaient jetés. Les derniers en date furent notamment le pont sur le fleuve Congo à Matadi et le pont Lunda Bululu (du nom du tout premier Premier ministre de la transition politique) construit en 1990 sur la rivière Makelele à Kinshasa, capitale de la RDC. … A UN PAYS EN RUINE
« Un réseau routier performant, cela n’appartient plus qu’au passé », regrette un ingénieur de l’Office des routes. Approché par la rédaction du journal Le Potentiel pour dire ce qu’il pense de l’état des infrastructures routières en RDC, ce cadre n’a pas eu sa langue en poche. « C’est de l’histoire ancienne que ces belles routes qui formaient jadis une sorte de toile d’araignée à travers notre pays », a-t-il déclaré. Avant de poursuivre : « Comment voulez-vous que dans un corps sans vaisseaux sanguins, le sang puisse circuler », a-t-il dit, faisant ainsi allusion à la RDC qui a cessé depuis, d’être lotie en routes. A telle enseigne que l’enclavement d’une grande partie du pays est devenu un fait banal.
Dans tous les cas, aujourd’hui il faudra que le pays mette tout en œuvre de sorte à inverser ces malheureuses tendances et à doter la RDC d’un réseau routier susceptible de booster son économie et de rendre possible le bien-être de ses habitants…