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LOSAKO
12 janvier 2011

«Joseph Kabila» se disqualifie pour forfaiture

jkconstitutionEn faisant approuver l’initiative de réviser la Constitution en violation de tous les garde-fous prévus par le Constituant de février 2006, «Joseph Kabila» est en passe de s’arroger un pouvoir totalitaire. Il ramène ainsi, la très mal nommée République «démocratique» du Congo, treize années en arrière. Sous d’autres cieux, le président sortant devait être destitué et mis en accusation pour haute trahison. Les 334 députés sur 337 ayant approuvé cette proposition - moyennant un «petit cadeau présidentiel» - viennent de confirmer que plus rien n’indigne les Congolais.

Démonstration de force

Lors de la parade militaire organisée le 30 juin dernier, à l’occasion du cinquantième anniversaire de la proclamation de l’indépendance de l’ex Congo-belge, le président sortant «Joseph Kabila» avait envoyé un message subliminal à la population congolaise. En exhibant plusieurs matériels militaires dont des chars de combat acquis par sa garde prétorienne, l’homme envoyait, au peuple congolais en général et à ses adversaires politiques en particulier, un message qui ne peut être décrypté que comme suit : «J’y suis, j’y reste !». Il ne lui restait qu’à donner un semblant de «formalisme» à cette démarche qui sert nullement l’intérêt général mais bien ceux d’un dirigeant défaillant qui n’a tenu aucune de ses promesses.

Le mardi 11 janvier 2011 restera une «journée noire» dans les annales de la «jeune démocratie» congolaise. C’est ce jour que des députés inciviques et peu vertueux ont décidé d’hypothéquer l’avenir collectif en détricotant une Constitution péniblement élaborée au lendemain du dialogue inter-congolais. «En conséquence, l’Assemblée nationale a approuvé le bien-fondé de la révision de la Constitution du 18 février 2006», a déclaré, mardi, le PPRD Evariste Boshab, président de l’Assemblée nationale, lors de la lecture du résultat du vote dans un hémicycle déserté par les députés de l’opposition. C’est au tour du Sénat à se prononcer selon les mêmes termes avant la convocation des deux Chambres en congrès pour entériner l’ukase de «Kabila». Vital Kamerhe qui connaît bien le «système Kabila» a eu ces mots dans une interview accordée à l’hebdomadaire «Jeune Afrique» n°2609 : «Des dollars vont être distribués (…).»

Quels sont les articles de la Constitution appelés à être modifiés?

Sauf changement de dernière minute, il y a les articles 71, 110, 126, 149, 197, 198, 218 et 226. Au total, les amendements à opérer vident de sa substance l’article 220 qui servait de verrou à toute «révision intempestive». Cette disposition stipule : «La forme républicaine de l’Etat, le principe du suffrage universel, la forme représentative du gouvernement, le nombre et la durée des mandats du président de la République, l’indépendance du Pouvoir judiciaire, le pluralisme politique et syndical ne peuvent faire l’objet d’aucune révision constitutionnelle. Est formellement interdire toute révision constitutionnelle ayant pour objet ou pour effet de réduire les droits et libertés de la personne, ou de réduire les prérogatives des provinces et des entités territoriales décentralisées.»

kabila_loiQuelles sont les «innovations» attendues ?

Pour l’essentiel, le président de la République sera à l’avenir élu à la «majorité simple» (article 71). Le Pouvoir judiciaire, lui, cesse d’être un «Pouvoir» au même titre que le législatif et l’exécutif (article 149). Il n’est plus qu’un ensemble des cours et tribunaux civils et militaires dont le budget continuera à être fixé par le gouvernement et non par la loi pour garantir l’indépendance des juges. Voici la nouvelle formulation du premier alinéa : "La Cour de cassation, la Cour constitutionnel, la Haute cour militaire, les cours et tribunaux et militaires sont indépendants du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif". Plus préoccupant, «les magistrats du parquet exercent leur ministère sous l’autorité du ministère ayant la justice dans ses attributions.» Ce nouvel alinéa vient renforcer l’inféodation des magistrats du parquet au pouvoir politique. Les droits et libertés du citoyen risquent d’être les grands perdants dans ce pays où les trois pouvoirs sont concentrés entre les mains d’un seul homme.

La Constitution désacralisée

L’amendement à apporter à l’article 197 constitue un chef d’œuvre de la bêtise humaine dans la mesure où il ne se soucie même pas du parallélisme des formes. On apprend ainsi que «lorsque des circonstances politiques graves menacent d’interrompre le fonctionnement régulier des institutions provinciales, le président de la République peut par ordonnance délibérée en conseil des ministres et après avis des bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat, dissoudre une assemblée provinciale. (…).» Le chef de l’Etat s’arroge ainsi le pouvoir de congédier des «élus locaux» par simple «décret». Et ce, pour des raisons connues de lui seul.

L’article 198 enchaîne dans la même logique : «Lorsque des circonstances politiques graves menacent d’interrompre le fonctionnement régulier des institutions provinciales, le président de la République peut par ordonnance délibérer en conseil des ministres et après avis des bureaux de l’Assemblée nationale et du sénat, relever de ses fonctions le gouverneur de province». Malheur aux gouverneurs n’appartenant pas à la même famille politique de le chef de l’Etat.

L’amendement suggéré à l’article 218 consacre purement et simplement la désacralisation de la Constitution. Dans sa formulation actuelle, cet article stipule notamment que l’initiative de la révision constitutionnelle «n’est définitive que si le projet, la proposition ou la pétition est approuvée par référendum. Toutefois, le projet, la proposition ou la pétition n’est pas soumis au référendum lorsque l’Assemblée nationale et le Sénat réunis en congrès l’approuvent à la majorité des trois cinquième des membres les composant.» A l’avenir, le projet, la proposition ou la pétition ne sera plus soumise au référendum. Il suffira pour ce faire que le président de la République décide de convoquer les deux Chambres «en Congrès». Et le tour est joué. «(…), dans ce cas, le projet ou la proposition n’est approuvé que s’il réunit la majorité de trois cinquièmes des suffrages exprimés.» La révision de la Constitution ne sera plus approuvée «par référendum» que "sur convocation" du président de la République. Un comble !

Un chef d’Etat dénué de légitimité

kabila_kadogoL’article 226 relatif à l’installation des institutions politiques devient : «Une loi de programmation détermine les modalités d’installation de nouvelles provinces conformément à l’article 2 de la présente Constitution.»

On le voit, «Joseph Kabila» et sa mouvance ont décidé – en dépit de la désapprobation unanime - de recourir à un «passage en force» pour imposer aux 60 millions des Congolais des amendements constitutionnels qui dénient à ceux-ci la qualité de détenteur de «l’autorité finale». Le souverain primaire. Pire, la révision constitutionnelle mise en oeuvre méconnaît allègrement l’esprit et la lettre ayant guidé le Constituant de février 2006. A savoir notamment : l’éradication des causes de «la contestation de la légitimité des institutions et de leurs animateurs», contrer toute dérive dictatoriale, assurer le fonctionnement harmonieux des institutions de l’Etat, assurer l’alternance démocratique et instaurer un Etat de droit. C’est la préoccupation exprimée dans l’article 220. Dans l’exposé des motifs, le Constituant de février 2006 dit son souci de mettre la Constitution à l’abri de «révision intempestive». Le démarche entamée par "Kabila" et les kabilistes en est une.

Et maintenant ! Que va faire l’opposition face au défi qui lui est lancé? «Nous disons non !, a déclaré mardi 11 janvier François Muamba Tshishimbi, secrétaire général du MLC. Le droit n’a plus de place ici. Nous allons défendre notre pays par toutes voies.» Est-ce en faisant du juridisme aride alors que le "combat" ne se situe plus sur le terrain du droit mais des manoeuvres politiciennes? Le problème ne se situe-t-il pas désormais au niveau de rapports de force entre un pouvoir illégitime aux abois et les représentants des forces politiques et sociales de l’opposition qui peinent à parler d’une seule voix pour s’affirmer comme une alternative? En introduisant une motion contre le président de l’Assemblée nationale, l’opposition parlementaire ne contourne-t-elle pas le vrai problème en évitant soigneusement d’initier la mise en accusation de «Joseph Kabila» pour forfaiture?

Baudouin Amba Wetshi

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