Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LOSAKO
2 février 2010

Agression des députés provinciaux: "Tolérance zéro" à géometrie variable

kyungu_katumbiEn séjour à Lubumbashi où il a ordonné la fermeture, dès vendredi 29 janvier, du siège de l’Assemblée provinciale du Katanga après les «incidents» du jeudi, le ministre de l’Intérieur, le PPRD Célestin Mbuyu Kabango, a joué la carte diplomatique en tenant une sorte de «causerie morale» aux parlementaires provinciaux. Il a, par contre, «condamné» le «silence» de la police. Réagissant aux propos d’un député provincial qui a fustigé l’inaction du gouvernement central, le ministre de la Communication et des médias a estimé que le gouvernement n’est pas habilité à sanctionner les fauteurs des troubles à l’ordre public. Ce rôle revient à la justice.

Les observateurs l’avaient prédit : le gouvernement central ne prendra aucune mesure disciplinaire à l’encontre de l’actuel président de l’Assemblée provinciale du Katanga. Jeudi 28 janvier, quatre députés provinciaux ont été copieusement tabassés par des membres de la «Jeunesse» du parti UNAFEC (Union des nationalistes et fédéralistes du Congo) de Gabriel Kyungu wa Kumwanza. Une démonstration inadmissible de l’intolérance politique. Ces faits se sont déroulés au bâtiment du 30 juin où siège cette assemblée. C’est à croire que le Congo est revenu cinquante années en arrière à l’époque où chaque organisation politique avait sa milice pour terroriser le camp adverse.

Arrivé vendredi à Lubumbashi, le ministre de l’Intérieur a ordonné la «fermeture provisoire» de l’hémicycle. Un acte qui énerve le principe sacro-saint de séparation des pouvoirs. Mbuyu s’est par la suite entretenu avec les députés et leur président dans une sorte de «causerie morale» à l’issue de laquelle il a invité d’une part les parlementaires provinciaux «à respecter les textes légaux» et d’autre part le président de l’Assemblée à être «à l’écoute des députés». La responsabilité de la Junafec dans le passage à tabac de quatre députés provinciaux par un groupe de jeunes identifiés comme étant des membres de l’Unafec ? Pas un mot.

gouvernement_conseil_congo«Gouvernement central amorphe»

Selon le ministre Mbuyu, cité par radio Okapi, l’incident survenu jeudi dernier découle d’une «incompréhension». Et que les députés pétitionnaires n’ont pas été agressés par leurs collègues mais plutôt par des «fanatiques». Ah bon ! Des fanatiques au service de qui ? Mbuyu n’a pas osé se poser cette question tout en assurant que l’«enquête se poursuivait». A l’heure où tous les zélateurs du kabilisme fredonnent à tue-tête «Tolérance zéro», le ministre de l’Intérieur vient ainsi d’accorder l’impunité aux militants d’un parti politique qui ont agressé sciemment des élus provinciaux en plein exercice de leurs fonctions. Est-ce parce que cette formation politique fait partie de l’AMP (Alliance de la majorité présidentielle) ? Est-ce parce que le commanditaire présumé fait partie des «notables intouchables» au Katanga ? Dissimulant à peine son impuissance face aux événements, le «premier flic» de la RD Congo a choisi de s’en prendre aux plus faibles en condamnant le «silence» des policiers chargés d’assurer la sécurité du parlement provincial.

Exaspéré, un député provincial, étiqueté PPRD, est sorti du lot en invitant le gouvernement central «à frapper durement» les auteurs des incidents du jeudi 28 janvier. Son nom : Jean de la Croix Mwenze Mutombo. Quel sacré courage ! «La milice de Bundu dia Kongo, a-t-il déclaré, a été réprimée. Il en est de même de la milice de Dongo. La République doit être impartiale. Pourquoi le gouvernement laisse-t-il faire les milices du Katanga ?» Et de poursuivre : «Un ministre national en séjour à Lubumbashi a été menacé par des membres de la milice d’un «Monsieur» qui se prend pour le «père» du Katanga et se croit de ce fait en droit de faire n’importe quoi.» Le député Mwenze de conclure sous forme de sentence : «Le gouvernement central est amorphe».

Bagarre ou agression ?

MENDE2Cette prise de position aux allures de réquisitoire a fait bondir le ministre de la Communication et des médias, Lambert Mende Omalanga. On se demande si celui-ci prend la peine de préparer ses interventions. «On ne peut pas comparer ce qui s’est passé au Bas-Congo et à Dongo à cette bagarre qui a eu lieu à l’assemblée provinciale du Katanga, tonne-t-il.» Mende fait là une appréciation erronée des faits d’autant plus que tous les témoins sont unanimes pour reconnaître que des députés ont été tabassés. Il ne s’est donc pas agi d’une bagarre mais bien d’une agression physique. Le ministre Mende n’a cure de persister dans l’erreur : «Le gouvernement n’a pas la prérogative constitutionnelle de «frapper» comme il le dit. Il appartient à la justice de faire son travail. Nous sommes quand même un Etat de droit où le gouvernement n’a pas la charge ou la prétention de faire le ménage à la place d’autres institutions. Un élu doit se garder de jeter de l’huile sur le feu.» Et de conclure : « (…), nous ne sommes pas au courant de l’existence d’une milice (…). Si quelqu’un utilise un parti politique pour commettre des infractions, la justice doit faire son travail. Il n’y a que la justice qui peut déclarer une personne coupable ou non.»

Le ministre de la Communication et des médias confond manifestement le prescrit de l’article 151 de la Constitution qui prohibe toute forme d’injonction négative («Le pouvoir exécutif ne peut donner d’injonction au juge, à statuer sur les différends, ni entraver le cours de la justice, ni s’opposer à l’exécution d’une décision de justice») et le pouvoir dont dispose le ministre de la Justice de donner une «injonction positive» aux magistrats du parquet lorsque ceux-ci perdraient de vue de se saisir en cas de commission d’une infraction. Selon la logique du ministre Mende, son collègue de la Justice sert juste de décorum au sein du gouvernement. Il ne peut donc être responsable des dysfonctionnements pouvant survenir dans son secteur d’activité. Question : Peut-on décemment parler de non-ingérence de l’Exécutif dans le fonctionnement de l’appareil judiciaire lorsque le chef de l’Etat peut décider proprio motu de nommer, de mettre à la retraite ou de révoquer des magistrats tant du parquet que du siège en violation de l’article 152 de la Constitution qui confère au Conseil supérieur de la magistrature le pouvoir d’élaborer les propositions en ces matières ?

"Tolérance zéro"

moratoire_01_09_09L’irresponsabilité du gouvernement que tente de justifier maladroitement le ministre Mende est à géométrie valable. Le compte-rendu de la réunion du Conseil des ministres du vendredi dernier est plus qu’édifiant. On peut lire notamment :
«A Lubero, le commandement local a signalé quelques faits infractionnels à charge de quelques militaires des FARDC engagés dans les opérations de traque des FDLR en territoire de Lubero. La justice militaire a d’ores et déjà été saisie de ces cas et appliquera un châtiment sévère à l’endroit de quiconque sera trouvé coupable de ces faits, conformément à l’option de Tolérance Zéro.» «A Kinshasa, le Conseil a eu à déplorer l’envahissement récurrent de l’ISP/Gombe par des jeunes désœuvrés (Kuluna) qui s’y livrent à des actes délictuels et anti-sociaux. Des mesures palliatives ont été prises.» «Le Policier Pelele de l’IPK a été tué au cours d’un accrochage avec des malfrats à Masina. Le gouvernement présente ses regrets à ses collègues de la Police nationale et offre toute sympathie et l’appui de l’Etat à sa famille éplorée. Le Conseil des ministres a chargé tous les services relevant du gouvernement de s’impliquer activement dans l’identification et l’arrestation des malfaiteurs auteurs de ce crime en vue de leur comparution en justice.» Vous avez dit «Tolérance zéro»?

B.A.W

Publicité
Commentaires
Publicité
Archives
LOSAKO
  • Le porte-voix de tous ceux qui cherchent vainement dans quel forum de ce monde, ils peuvent se faire entendre.. Oui, je veux donc parler au nom de tous les « laissés pour compte » parce que « je suis homme et rien de ce qui est humain ne m’est étranger ».
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Catégories
Publicité