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LOSAKO
17 avril 2009

Laurent Nkunda à l’assaut de la justice rwandaise

_45406106_006518546_2Trois mois après son «arrestation» à Gisenyi, la situation de l’ex-Chairman du CNDP baigne dans un flou artistique manifestement voulu tant à Kinshasa qu’à Kigali. Avocat au barreau québécois, Maître Stéphane Bourgon, conseil de Laurent Nkunda, accuse l’Etat rwandais de détenir le leader du CNDP «sans base légale». A chacune de leur rencontre, le ministre congolais des Affaires étrangères, Alexis Thambwe Mwamba, et son homologue rwandaise, Rosemay Museminali, ne cessent d’évoquer l’«extradition prochaine» de Nkunda à Kinshasa…

Après trois mois de quasi-silence, Laurent Nkunda refait parler de lui. Quasi-silence parce que dans un communiqué, daté 6 mars dernier, Bertrand Bisimwa, ancien porte-parole du CNDP «originel», sonnait le tocsin en annonçant que madame Elizabeth Nkunda, a confié la défense de son époux entre les mains d’un avocat canadien nommé Stéphane Bourgon. «Le général-major Laurent Nkunda est détenu sans base légale», assenait le juriste en invitant l’Etat rwandais à «préciser les motifs et le fondement juridique de l’arrestation et de la détention sur son territoire» de son client en exigeant au passage sa libération «sans délai».

Jusqu’ici la stratégie des autorités rwandaises a consisté à faire la sourde oreille. Voilà que Nkunda revient à la charge en intentant une action contre l’Etat rwandais qu’il accuse d’«arrestation arbitraire». Il faut dire qu’à Kinshasa comme à Kigali, on ne joue pas franc-jeu dans cet épineux dossier.

CPS_SZC11_240109200320_photo02_photo_default_512x340Une pièce de théâtre

Cette saga se déroule comme une pièce de théâtre à plusieurs actes. Premier acte : mi-janvier, un quarteron d’officiers du CNDP commandé par le «général» Bosco Ntaganda décide de «déposer» Laurent Nkunda Mihigo et annonce le 17 janvier la «fin des hostilités». Deuxième acte : le 20 janvier, des soldats de l’armée régulière rwandaise (RDF), estimés à plus de 5.000 hommes, font leur entrée sur le territoire congolais. Motif avoué : «traquer» les miliciens FDLR hutus rwandais. L’opération est un véritable «flop». Les FDLR sont toujours aussi présents et nuisibles. Troisième acte : plusieurs centaines des soldats de l’armée rwandaise prennent la direction du fief de Nkunda. Le 22 janvier, les autorités de Kigali annoncent l’arrestation de ce dernier à Gisenyi. Faux, répliquaient les proches de l’officier dissident. Selon eux, le Chairman répondait à une invitation du général James Kabarebe. Qui dit vrai ?

610x0On le sait le «général Laurent» est «réclamé» par les autorités congolaises qui lui imputent «des crimes» commis dans les provinces du Nord Kivu et du Sud Kivu. Son arrestation semblait résulter d’un "arrangemment politique" entre le Rwanda et la RD Congo. Une chose paraît sûre : au Congo comme au Rwanda, Nkunda dérange. Tout procès pourrait avoir l’effet d’une bombe à retardement pour les dirigeants en place, issus des anciens mouvements rebelles en l’occurrence le FPR (Front patriotique rwandais) et l’AFDL (Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre).

Lors de leurs nombreuses réunions de travail, le chef de la diplomatie congolaise, Alexis Thambwe Mwamba, et son homologue rwandaise, Rosemary Museminali, n’ont jamais manqué d’évoquer la question relative à l’"extradition prochaine" de l’ex-Chairman. Dans un premier temps, le ministre Thambwe déclarait sans rire que Nkunda devait être incarcéré dans un lieu aménagé spécialement pour lui. Et ce, de peur que les autres prisonniers «lui fassent la peau». Aux dernières nouvelles, le dossier devrait faire l’objet d’une «réunion de travail» entre les ministres de la Justice des deux pays.

Thambwe_20_MuseL’extradition, tôt ou tard

En tous cas, l’extradition de l’ex-chef charismatique du CNDP est loin d’être à l’ordre du jour. La Présidence rwandaise ne dit pas autre chose. "Sa demande est examinée par un tribunal aujourd’hui à Gisenyi. Cela n’a rien à voir avec l’extradition", a déclaré vendredi 17 avril Yoland Makolo, porte-parole du président Paul Kagamé. Elle a néanmoins admis que Nkunda sera extradé «tôt ou tard».
Le ministre rwandais de la Justice, Tharcisse Karugarama, est plus prudent. Il a estimé que «le cas de Nkunda était inhabituel et devait être traité avec précaution.» A qui le dit-il ? Et de souligner qu’«il n’est pas courant qu’un général d’un Etat se retrouve devant le tribunal d’un autre». «Ce qui arrive à Nkunda au Rwanda ou au Congo peut avoir un impact positif ou négatif sur l’évolution de la paix dans la région.»

L’attitude des autorités de Kinshasa ne brillent pas par sa cohérence dans ce dossier. Tout en exigeant le transfert du «général Laurent», Joseph Kabila ne s’est pas empêché, début février, d’instruire le ministre congolais de la Justice de signifier aux cadres et combattants du CNDP qu’une amnistie générale leur sera accordée. En exécution de cette injonction présidentielle, ce ministre a pris sa plus belle plume pour rédiger la lettre n°0226/JPM284/D/CAB/MIN/J/2009 datée 9 février 2009. Le destinataire de cette missive n’est autre que son homologue Raymond Tshibanda, chef de la délégation gouvernementale aux négociations avec le CNDP.

justice_internationaleDemander pardon

Selon Bertrand Bisimwa, l’Abbé Malu Malu a «distribué» des photocopies de ladite correspondance à Goma. C’était le dimanche 1er mars. Que dit cette lettre ? Le ministre Luzolo dit en termes sans équivoques «l’engagement du gouvernement d’accorder l’amnistie aux membres des groupes armés ayant opéré au Nord-Kivu et au Sud-Kivu, notamment le CNDP, pour consolider la paix et assurer la concorde nationale.». Le procureur général de la République et l’Auditeur général des FARDC ont été instruits par ce ministre «de ne pas engager des poursuites contre les membres des groupes armés et d’arrêter celles déjà initiées.»

C’est sans doute cette lettre qui sert de «base juridique» à la défense de Nkunda pour dénoncer l’illégalité de son assignation à résidence au Rwanda alors que l’Etat congolais a pris la résolution politique d’oublier tous les crimes commis sur son territoire. A noter le projet de loi adopté à l’Assemblée nationale a été rejeté au Sénat. Au motif que la mesure de clémence est jugée par trop "sélective". La Commission paritaire du Parlement devrait concilier les positions des deux Chambres.

151558Notons qu’au lendemain de la commémoration du 15 ème anniversaire du génocide rwandais, le président Paul Kagame a glissé une phrase pleine de sous-entendus dans un entretien avec «Le Soir» de Bruxelles. Selon lui, Nkunda constitue une part du problème mais aussi «une part de solution» dans la situation dans les Grands Lacs.

Dans l’interview accordée au très influent «New York Times», début avril, Joseph Kabila se découvre la vocation d’un confesseur. Il y conseille à Nkunda de battre sa coulpe en demandant pardon aux populations des provinces du Kivu : «(…). And I believe if he is as intelligent as everyone thinks he is, he might start from there, asking for the people, especially the people of North and South Kivu, to forgive him, and to say, well, what he did was very bad.»

Madeleine Wassembinya/B.A.W.

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