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LOSAKO
20 mai 2008

Jusqu’où n’ira pas Tshisekedi ?

16660389_mOn peut s’en plaindre ou s’en réjouir, qu’importe, Etienne Tshisekedi, leader de l’Udps et symbole de la lutte pour la démocratie et les droits de l’homme en RDC depuis les 30 dernières années n’a jamais tant mérité le surnom de sphinx. S’il sait se taire parce qu’incompris, s’il sait prendre du recul par rapport aux événements, s’il admet volontiers commettre des erreurs de stratégie, il n’empêche que les événements finissent toujours par lui donner raison. Pas pour la gloriole : la mort dans l’âme, Tshisekedi sait combien chacune de ses prédictions, en s’accomplissant, confirme le recul de la RDC sur le plan des droits et des libertés ainsi que dans la marche, qu’il a toujours souhaitée puissante et irréversible, vers le développement.

Le constat est accablant. L’insécurité dans l’Est, l’embourbement du processus de paix de Goma, les provocations des Fdlr, la persistance du phénomène des groupes armés, l’affaire Bundu dia Kongo… confirment chaque jour à quel point les élections seules ne suffisaient pas ; qu’il ne s’agissait pas de les organiser vaille que vaille pour disposer enfin de la recette infaillible, sans avoir au préalable préparé les cœurs et les esprits. Enfin, la légitimité issue des urnes n’était pas une réponse à tout et la considérer comme un passe droit ou un chèque en blanc serait la pire des erreurs.

Ce n’est pas tout.

Il n’est pas moins surprenant de vivre cette presque rupture qui ne dit pas son nom entre les parrains occidentaux qui avaient joué des pieds et des mains pour imposer aux Congolais à la fois leur schéma électoral et ses résultats, jusqu’à déployer un contingent surarmé et menaçant de l’Eufor. Enfin, à eux seuls, les scandales révélés par la commission de révisitation des contrats miniers, les débats à l’Assemblée nationale sur les contrats chinois, la convention MagEnergy, ou encore l’affaire des blocs du Graben Albertine – pour ne citer que ces quelques exemples - prouvent une fois de plus et de manière dramatique que les pratiques maffieuses sont au cœur du libéralisme économique à la congolaise. Au point que de plus en plus nombreux sont ceux, parmi nous, qui se demandent à quoi il a servi de chasser la IIè République si l’exercice du pouvoir aujourd’hui n’a point d’autre ligne de conduite à proposer aux Congolais que celle qui consiste à reproduire, jusqu’à l’ironie, les pires de ses modèles et, bien souvent, à les dépasser.

Bref, pas de réconciliation nationale, persistance de l’insécurité, répression brutale des revendications démocratiques, pillage des ressources du sol et du sous-sol dans un contexte qui n’est ni celui de la guerre ni celui de la partition, corruption généralisée…En dehors de l’avènement des institutions dites légitimes et de leurs animateurs – qui étaient déjà aux affaires tout au long du régime 1+4 – qu’est-ce qui a donc changé dans ce pays, dans les pratiques et comportements dont on ne retrouve les racines dans la transition post-Sun City, à part le fait que là où les responsabilités étaient hier partagées, un seul groupe jouit désormais de l’exclusivité des avantages et privilèges liés à l’exercice du pouvoir ?

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Voilà donc qui a fini, comme sous la IIè République, par dessiller les yeux de la plupart des Congolais et par rendre, une fois de plus, très séduisants la démarche et les enseignements de l’Udps, au point que le parti d’E. Tshisekedi, bien qu’en proie à un débat interne qui continue de faire rage, apparaît, au fil des sondages, comme la plus crédible des alternatives, la question étant, évidemment, de savoir comment transformer cette formidable attente, cet immense besoin, en stratégies de mobilisation et de conquête du pouvoir par la voie démocratique à l’horizon 2011.

La réponse d’E. Tshisekedi avait été donnée depuis le milieu de l’année dernière, grâce à une option très claire pour l’organisation d’un congrès qui devrait être à la fois un moment d’évaluation et d’autocritique, et un instant de redéfinition des moyens et des stratégies pour la conquête du pouvoir. Une double approche, selon les analystes, tournée à la fois vers les masses parfois déçues par l’absence cruelle d’impact et vers nos partenaires extérieurs généralement découragés par un extrémisme improductif, et surtout par l’incapacité à transformer l’immense crédit dont dispose l’Udps dans les masses en élément de conquête du pouvoir.

La première approche suppose naturellement qu’il soit mis fin aux incertitudes du débat interne, aux querelles de positionnement et au double langage qui projettent du parti une image floue de bateau ivre et sans capitaine auprès de ses propres militants. Il suffit en effet de jeter par exemple un coup d’œil sur la gestion des initiatives dites de réconciliation prises par la fédération d’Afrique du sud pour se rendre compte à quel point les stratégies de blocage interne et d’ambitions personnelles sont toujours à l’œuvre, jusqu’à primer sur les intérêts à long terme du parti lui-même. Dans le même ordre d’idées, l’approche extérieure suppose que l’Udps sera en mesure de lancer des signaux clairs en direction des partenaires traditionnels de la RDC bien déçus par le fiasco retentissant de ses stratégies.

Jusqu’où ?

Pour toutes ces raisons, le Congrès de l’Udps sera un grand moment. Voilà donc pourquoi, aux yeux des observateurs avertis, il est capital qu’il se tienne dans les meilleurs délais afin de clarifier une fois pour toutes la démarche de la fille aînée de l’Opposition démocratique congolaise comme initiative tournée à la fois vers l’opinion intérieure et extérieure. En d’autres termes, admettre une telle évidence, c’est d’abord souligner le devoir de vigilance interne par rapport à ceux qui n’auront de cesse de torpiller la démarche de redéfinition des stratégies au regard de leurs propres ambitions ou du degré de manipulation dont ils sont consciemment ou inconsciemment l’objet au regard des objectifs globaux du parti. C’est, ensuite, porter une interrogation lucide et sans complaisance sur les ressources dont disposerait Etienne Tshisekedi pour conduire personnellement la démarche de transformation de son parti, sans se faire hara-kiri, en mobilisant celui-ci autour d’un leadership incontestable, plus séduisant, plus ouvert et plus moderne, éloigné d’un certain extrémisme, certes indispensable en période de libération mais combien improductif en termes de stratégie de conquête du pouvoir.

Il est vrai que, par rapport à ces attentes, la retraite sud-africaine d’E. Tshisekedi, d’abord pour des raisons de santé, ensuite dans un cadre plus privé, n’a pas toujours apporté les clarifications qu’en attendait l’opinion. Le leader de l’Udps a notamment gardé un silence de marbre qui a fini par troubler face à toutes les sollicitations dont il a été l’objet, allant jusqu’à préciser, a appris Le Phare, que les affaires du parti ne pouvaient pas se traiter en terre sud-africaine. Les voies du sphinx, ont indiqué les mêmes sources, n’ont donc jamais été aussi insondables, au point que personne ne peut aujourd’hui les commenter dans un sens ou un autre sans prendre le risque de verser dans la manipulation…

C’est aussi la même discrétion qui entoure le séjour bruxellois d’Etienne Tshisekedi depuis plus d’une semaine bientôt. Un séjour qui s’effectue sans tambour ni trompette et qui, là aussi, échappe totalement aux rouages traditionnels de l’Udps. Jusqu’où le leader de ce parti observera-t-il cette ligne de conduite qui surprend aussi bien les commentateurs que son propre entourage ? Deux éléments semblent clairement se détacher à ce niveau. D’abord la nécessité d’opérer un bilan exhaustif sur les préoccupations de santé qui avaient justifié le déplacement du leader de l’Udps en Afrique du sud. Ensuite, l’option qui s’impose de plus en plus en faveur d’une démarche plus discrète, moins bruyante et moins spectaculaire dans le sens d’une profonde réflexion sur la situation du parti et son avenir.

Voilà donc pourquoi E. Tshisekedi déroute désormais. Voilà pourquoi tout porte à croire qu’il surprendra encore. Voilà enfin pourquoi ceux qui prétendent s’exprimer en son nom et avec sa bénédiction prennent le risque d’être publiquement désavoués dans un avenir qui n’est plus aussi lointain.

Deux choses, en tout cas, semblent certaines à ce niveau. Premièrement, E. Tshisekedi s’exprimera incontestablement pour préciser sa pensée et ses choix personnels au bout d’une réflexion dont personne ne doute plus. Deuxièmement, si on ne change pas une équipe qui gagne, en politique plus qu’ailleurs les méthodes qui ont échoué ainsi que ceux qui en ont été publiquement les porte-étendards devront impérativement assumer la responsabilité du coup de balai qui se profile…

Plus que tout autre, Tshisekedi est bien placé pour savoir combien la politique se fait sans état d’âme et combien il est impératif aujourd’hui de redéfinir les orientations, les structures ainsi que les hommes chargés de les animer. On peut parier. Le Phare

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