RDCongo: calme à Matadi après un assaut meurtrier de la police contre le BDK
Le calme était revenu dimanche à Matadi au lendemain de l'assaut de la police contre le siège du mouvement d'opposition politico-religieux Bundu dia Kongo (BDK) qui a fait au moins deux morts dans cette ville de l'ouest de la République démocratique du Congo (RDC).
"Je me suis rendu à l'hôpital général. Il y a un bébé de deux ans à la morgue. J'ai aussi vu un membre de BDK mort dans leur siège qui est maintenant occupé par la police. Il y a aussi eu six blessés", a déclaré dimanche à l'AFP Jean-Marc Nzeyidio, maire de Matadi, capitale de la province du Bas-Congo.
"La situation est calme ce matin (dimanche). Les gens sortent, se rendent à l'église. Je veux dire aux habitants que la ville de Matadi n'est pas en guerre. La population doit vaquer librement à ses occupations", a-t-il ajouté.
De son côté, la Mission de l'ONU en RDC (Monuc) s'est déclarée "grandement préoccupée par les nouvelles violences", dans un communiqué.
"Ces affrontements dans le quartier Belvédère de Matadi ont coûté la vie à plusieurs personnes et causé des dégâts matériels importants", souligne la mission de l'ONU, qui dit "surveiller la situation de près" et "appelle toutes les parties au calme et à la retenue".
Selon des sources locales congolaises et des sources diplomatiques s'exprimant sous couvert d'anonymat, le bilan provisoire de cet assaut oscillerait entre quatre et six morts, et plusieurs blessés.
Le maire de Matadi, qui avait manifesté samedi son agacement de ne pas avoir été "informé" de l'opération de police dans sa ville, a toutefois souligné dimanche que les policiers avaient "rétabli l'ordre à la suite de nombreuses plaintes (d'habitants) et dérapages perpétrés par le BDK".
Il a notamment rappelé que la Midema, la minoterie de Matadi, avait "saisi l'inspecteur provincial de la police après un incident dans la nuit du 5 mars", où un véhicule de transport du personnel de cette société a été "arrêté et illégalement fouillé par des membres de BDK".
"Ces gens ne reconnaissent pas l'autorité de l'Etat et appellent à chasser les +non-originaires+ du Bas-Congo, ce qui est inacceptable", a-t-il affirmé, tout en regrettant les "dérapages" de certains agents de police.
Depuis le 28 février, des affrontements entre adeptes de BDK et policiers ont fait au moins 25 morts au Bas-Congo, selon un bilan officiel. Des sources onusiennes et de la société civile ont de leur côté estimé que le bilan pourrait être d'une centaine de morts.
Bundu dia Kongo ("Royaume du Kongo") est un groupe d'opposition religieux sécessionniste très implanté dans le Bas-Congo. Il prône la restauration de l'ex-royaume Kongo, qui comprenait l'actuel Bas-Congo, une partie de l'Angola, du Congo voisin et du Gabon.
Son chef spirituel, le député Ne Muanda Nsemi, a accusé début mars la police d'avoir bombardé des civils et réclamé une "table ronde" sur la situation dans sa province. Le BDK dénonce depuis un an des fraudes électorales et un partage non équitable des ressources de la région, la seule productrice de pétrole en RDC.
Fin janvier 2007, plus de cent personnes avaient été tuées dans des affrontements entre forces de l'ordre et adeptes de BDK, au lendemain d'élections sénatoriales très contestées.
Pour un observateur international, "même si le BDK multiplie les dérapages et les provocations, le fait que Kinshasa réponde par un usage visiblement disproportionné de la force ne va certainement pas aider à ramener la paix dans la région".