Nouvelle explication Clinton-Obama

Les femmes et les Noirs détiennent les clés de la primaire en Caroline du Sud. Les stratèges démocrates s'inquiètent d'une lutte serrée qui pourrait se prolonger.

Tous les sondages donnent Barack Obama gagnant de l'élection primaire que les Démocrates organisent en Caroline du Sud ce samedi, une semaine après les Républicains. D'aucuns assurent que Hillary Clinton s'est d'ores et déjà résignée à cette défaite annoncée, mais on aurait sans doute tort de trop se fier à pareille rumeur : après tout, les sondages avaient faussement prédit un succès de M. Obama au New Hampshire.

L'issue de la compétition dépend largement de deux inconnues : le vote des Noirs et celui des femmes. On s'attend à ce que les premiers votent de façon prépondérante pour le sénateur de l'Illinois, tandis que les secondes devraient plus volontiers soutenir l'ex-Première Dame. C'est, en tout cas, l'analyse que faisait, parmi d'autres, Bill Clinton, qui a mené intensivement campagne pour son épouse.

L'ancien président est au demeurant devenu un sujet de préoccupation au sein du Parti démocrate qui lui reproche d'avoir insufflé de l'agressivité dans la campagne. Mme Clinton a ainsi exploité une interview de M. Obama dans laquelle il louait le talent politique de Ronald Reagan et la créativité de son parti dans les années 1980-1990. Une imprudence qui a suffi à le faire passer pour un admirateur des Républicains dans des publicités électorales un brin caricaturales.

Le ton est retombé et Barack Obama se plaît lui-même à minimiser l'incident en se montrant aussi magnanime que doit l'être un présidentiable préoccupé de rassembler. Car l'électorat démocrate est polarisé comme il l'a rarement été : les stratèges du parti regardent déjà au-delà de l'échéance de ce samedi pour envisager les scénarios possibles lors du "Super-Mardi" du 5 février, considéré ni plus ni moins comme "la plus grosse journée d'élections primaires dans toute l'histoire du Parti démocrate".

Encore les analystes ne sont-ils pas sûrs qu'on connaîtra au soir du 5 février le candidat du parti à la présidentielle. En outre, près de 800 délégués à la Convention démocrate de Denver, à la fin août, sur un total de 4 000, seront des électrons libres - des personnalités non élues lors des primaires et par conséquent libres de choisir le candidat de leur choix - et de faire pencher la balance si l'écart entre les prétendants est faible.

Un cadeau aux Républicains

Dans l'intervalle, l'état-major démocrate redoute qu'une lutte à couteaux tirés entre Hillary Clinton et Barack Obama ne fasse voler en éclats l'unité du Parti démocrate d'ici à la présidentielle du 4 novembre. Non seulement d'éventuels coups bas fourniraient-ils des munitions aux Républicains, mais ils pourraient détourner du candidat démocrate finalement choisi les partisans les plus tièdes et, surtout, les indépendants.

Or, le scénario deviendrait cauchemardesque si l'adversaire, le 4 novembre, devait être John McCain ou Rudy Giuliani, des Républicains atypiques qui comptent beaucoup, pour l'emporter, sur le vote des indépendants et des transfuges démocrates. La probabilité est faible s'agissant de Rudy Giuliani, qui a choisi de lancer sa campagne en Floride, lors de la primaire du 29 janvier, mais que les sondages donnent en perdition non seulement dans cet Etat, mais même dans son fief de New York et en Californie. John McCain est, par contre, plus que jamais dans la course. Il est au coude-à-coude avec Mitt Romney en Floride, tandis que les sondages le donnent favori à New York et en Californie, deux des gros enjeux du 5 février.