Joseph Kabila serait-il en insécurité ou plutôt s'expose au danger et à l'infamie de l'alliance étrangère ?
Bangui pour entretenir Bozize sur des questions bilatérales,
Addis-Abeba pour régler la crise des Grands Lacs avec Condoleezza Rice,
Lisbonne où l’Europe et l’Afrique avaient à se dire, et tout récemment
Rome où il devait être reçu par Benoît XVI, le chef de l’Eglise
catholique, etc., autant de rendez-vous cruciaux manqués auxquels le
chef de l’Etat n’a pu prendre part ou s’est tout simplement fait
représenté. Le commun de Congolais ne cesse de s’interroger sur
l’explication à fournir sur la situation. Joseph Kabila craindrait pour sa sécurité.
A en croire une dépêche de Xinhua reprise par grandreportersrdc.net, le
porte-parole de la Présidence aurait confirmé les menaces sur la
sécurité du chef de l’Etat dans le sens de ce qui se murmurait de
bouche à oreille à Kinshasa. La menace proviendrait d’un groupe dénommé
‘‘Tabula rasa’’ qui détiendrait deux missiles sol-air de type FIM-92
Stinger, introduites en RDC depuis l’Afghanistan où elles auraient été
vendues en 1996 par la CIA aux Talibans pour contrer le Commandant
Massoud, le lion du Panshir.
Selon le quotidien l’Observateur, sous la plume de son éditeur Mankenda
Voka, le président fait ‘‘l’objet de beaucoup d’attention malveillante.
Ceux qui lui sourient le matin, courent la nuit masqués avec des
couteaux bien aiguisés’’ et ‘‘les rangs de ses amis-ennemis ne font que
grossir’’. Plusieurs sources parlent de mécontentement dans la sphère
politique avec les derniers aménagements au sein de l’appareil de la
Majorité, de même que dans le gouvernement. Mais d’autres sources
n’hésitent pas à citer l’armée, objet de manipulation politicienne.
Courant contre sécurité
Kabila ne veut pas se faire avoir comme une bête traquée et prise
contre-mur par ceux qui en voudraient à sa vie. Une question de
confiance et d’efficacité se poserait dans sa ceinture et qui
envisagerait un renforcement de sa sécurité. Peut-être la réponse
viendrait-elle du Zimbabwe où la presse a été alimentée tout récemment
par la nouvelle des entretiens entre une délégation congolaise de haut
rang et la société nationale d’Energie (ZESA Holdings) du pays de
Robert Mugabe, sous l’égide du gouvernement zimbabwéen.
L’opération viserait, selon notre confrère The Independent, paraissant
à Harare dans son édition du 7 décembre, à fournir 80 à 100 mégawatt
d’électricité au Zimbabwe contre une unité militaire qui assurerait la
sécurité de Joseph Kabila. ‘‘Le Zimbabwe recevra de l’électricité
gratuite de la RDC jusqu’en mars prochain en échange d’un soutien
militaire accru pour renforcer la sécurité autour du président Joseph
Kabila, a appris The Independent’’, lit-on. ‘‘Selon cet arrangement,
Zesa Holdings, la société nationale d’électricité du Zimbabwe recevra
en plus 80 mégawatt de la SNEL sans être tenu de payer ces
importations’’.
La délégation avait rencontré le ministre zimbabwéen de l’Energie et du
Développement de l’Energie, Mike Nyambuya, le gouverneur de la Reserve
Bank du Zimbabwe, Gideon Gono ainsi que le Joint Operation Command
(JOC). Leurs discussions portaient sur un large éventail de questions,
y compris la fourniture électrique. La délégation devra repartir très
prochainement au Zimbabwe.
La source de notre confrère précise que deux responsables de la défense
du JOC avaient inscrit la question à l’ordre du jour des discussions
avec la délégation congolaise et l’on avait débattu en profondeur,
indique The Independent. ‘‘Les négociations sont maintenant à un stade
avancé, mais en principe, il y avait un accord. Je ne vois pas tout ce
qui devrait mettre fin à l’accord car les deux parties ont été d’un
commun accord à la proposition’’, a déclaré l’une des sources. ‘‘En
raison de la prescription, l’entente est actuellement entre 80 et 100
MW de puissance. Mais les engagements sont en cours et de nouvelles
offres pourraient être bientôt apportées’’, a-t-elle ajouté.
Selon le journal, un porte-parole du gouvernement, Vice-premier
Ministre de l’Information et de la Publicité, Bright Matonga a refusé
de faire de la lumière sur la question. ‘‘Ce sont des questions de
sécurité nationale et d’intérêt national’’, a-t-il déclaré. ‘‘Les
troupes de la RDC sont en mesure de protéger leur propre président.
Nous avons de très bonnes relations avec la RDC. Rappelez-vous nous
leur avons donné la liberté et l’indépendance dont ils jouissent
aujourd’hui. Toujours cette question demeure un problème très privé’’,
a affirmé Matonga.
Le numéro 1 de ZESA Holdings, Ben Rafemoyo n’a pas commenté sur la
question, précise le quotidien zimbabwéen. ‘‘Dans pareilles
discussions, si jamais elles ont eu lieu, il faut se référer au
Gouvernement, particulièrement au ministre (Nyambuya, de l’Energie,
ndlr)’’, a-t-il précisé. Le ministre Nyambuya a nié avoir rencontré la
délégation congolaise.
La chute suspecte de Mushake
Cette situation d’insécurité autour du chef de l’Etat étend ses peurs
sur l’ensemble de la situation sécuritaire du pays. Les récents revers
connus par les FARDC continuent à alimenter la polémique. On parle de
l’implication de certains généraux dans une manœuvre machiavélique qui
viserait à faire apparaître l’ombre de Jean-Pierre Bemba au Kivu.
Une pseudo mutinerie des plusieurs brigades des FARDC engagés sur le
terrain, dont la majorité est composée d’hommes issus des 22.000
soldats brassés du MLC de Jean-Pierre Bemba aurait été montée par des
officiers supérieurs de l’armée congolaise afin d’endosser la
responsabilité au sénateur Bemba et de le discréditer parmi la
population. La mutinerie montée de toute pièce aurait mal tourné et
s’est soldée par la récupération sans vrais combats des anciennes
positions perdues par les insurgés nkundistes. Peut-être une
explication sur la victoire de 4 000 hommes de Nkunda face à une force
loyaliste équipée et motivée.
Mais ce que les observateurs n’arrivent pas à comprendre c’est comment
une mutinerie qui n’était autre qu’une débâcle qu’on veut maquiller et
dont on cherche le bouc émissaire se serait fait suivre d’une réaction
en chaîne. La 14ème brigade, dans sa fuite lundi 11 décembre, avait
abandonné à Karuba ‘‘une quantité industrielle d’armes et de munitions
neuves, essentiellement chinoises, qui réarment à présent les mutins’’,
selon lalibre.net.
On voit que la Garde républicaine a elle aussi décroché de Kirolirwe,
un véritable verrou pour lancer un assaut sur Kitchanga, en emportant
son artillerie. La 82ème Brigade et des éléments des 7ème et 9ème
Brigades ont fait de même, comme tous les autres avant eux, se repliant
derrière les lignes de défense de la MONUC qui a menacé d’ouvrir le feu
sur les insurgés s’ils franchissaient Saké. La 81ème Brigade basée à
Katale, dans le Masisi, pour ne pas contribuer à renforcer l’ennemi,
avait jugé utile de faire sauter ses stocks d’armement.
Certains généraux devraient répondre de la situation, a-t-on appris le
week-end dernier. L’agence chinoise d’information évoque même les
indiscrétions d’un officier engagé dans les opérations à l’Est de la
RDC et qui a requis l’anonymat, selon lesquelles ‘‘cette pseudo-
mutinerie ne pouvait être mise en œuvre sans l’aval de Joseph Kabila
lui-même!’’. A ne rien piger !
Gérer la psychose
Il est maintenant du rôle des services de la Présidence d’expliquer
clairement les allégations et ‘‘trouver des mots pour amener les
Congolais à accompagner leur chef dans toutes ses terribles épreuves
qu’il vit en silence et stoïquement en ce moment’’, comme le souhaite
l’Observateur. La situation crée un climat de suspicion qui ne favorise
aucune projection sérieuse dans l’avenir et risque de bloquer toutes
les espérances pour un Congo nouveau. La démocratie a été adoptée par
les Congolais, le 18 décembre dernier, comme seule voie de prise de
pouvoir en RDC. Un autre moyen ne serait que la voie de la perdition.
Losako/Le Révélateur