Les troupes insurgées ralliées au général déchu Laurent Nkunda ont continué à progresser mardi et sont arrivées aux abords de Sake, cité de l'est de la République démocratique du Congo (RDC) défendue par des Casques bleus prêts à "ouvrir le feu".

"Les troupes de Nkunda sont arrivées jusqu'au sommet d'une colline surplombant Sake", à 30 km au nord-ouest de Goma, capitale du Nord-Kivu (est), a déclaré à l'AFP le porte-parole militaire de la Mission de l'ONU en RDC (Monuc), le major Prem Tiwari.

Les insurgés "ont atteint les limites. S'ils tentent d'avancer, de tirer sur nous, nous ouvrirons le feu. Nous sommes mandatés pour protéger les populations et la ville de Sake. Nous ne les laisserons pas aller au delà de leurs positions actuelles", a prévenu le major.

Mardi, la Monuc a renforcé ses effectifs à Goma, Sake et Rutshuru (à 50 km au nord de Goma) et déployé des blindés sur la route reliant Sake à la capitale provinciale.

Lundi, les troupes insurgées se sont emparées en quelques heures de deux localités du territoire de Masisi, Mushake et Karuba, situées à environ 40 km au nord-ouest et à l'ouest de Goma, infligeant un cinglant revers à l'armée nationale.

"Les insurgés ont lancé une attaque surprise. Nous avons été débordés, ils ont repris Mushake et Karuba, mais cela ne va pas durer", a déclaré à l'AFP le ministre congolais de la Défense, Diemu Chikez.

"L'armée est en train de se réorganiser. Nous combattons pour reprendre ces localités et rétablir la paix et la stabilité au Nord-Kivu. Nous n'avons pas le choix. Nkunda a porté la guerre sur le sol congolais, nous ne pouvons pas le laisser continuer cette aventure", a-t-il ajouté.

M. Chikez a assuré que les Forces armées congolaises (FARDC) avaient progressé plus au nord et s'étaient emparées de Mweso (à une dizaine de km au nord de Kitchanga, un des bastions de Nkunda situé à plus de 70 km au nord-ouest de Goma).

Les FARDC, qui ont massé près de 25.000 hommes au Nord-Kivu contre quelque 4.000 insurgés, avaient lancé le 3 décembre une vaste offensive contre les troupes de Nkunda, après trois mois s'affrontements réguliers dans la région.

Les soldats loyalistes avaient bien progressé les premiers jours autour de Sake, puis s'étaient emparées avec plus de difficulté de Mushake et de Kingi, respectivement à 10 km à l'ouest et au nord de Sake.

Dans un communiqué publié mardi soir, la Monuc affirme que les FARDC "ont repris le combat contre les insurgés de Nkunda dans plusieurs endroits du Nord-Kivu (dont Mweso), enregistrant des avancées significatives".

"Les FARDC, avec le soutien de la Monuc, sont en train de planifier une contre-offensive", indique le texte, précisant que l'armée et la Monuc "continuent de mettre l'accent sur la protection des populations civiles".

Mardi soir, les FARDC avaient néanmoins perdu pratiquement toutes les positions conquises ces derniers jours et même certaines récupérées depuis octobre, comme Karuba.

L'avancée fulgurante des troupes insurgées a entraîné une fuite désordonnée de soldats de différentes brigades et de milliers de civils, notamment en direction de Minova, au Sud-Kivu voisin.

A Minova, plusieurs déplacés ayant fui Karuba la nuit dernière ont raconté à l'AFP que les nkundistes avaient tiré sur les civils tentant de fuir en même temps que les FARDC, débordées par les insurgés.

"Ils (les nkundistes) ont tiré dans les colonnes de gens qui fuyaient dans la nuit. (...) Ils ont promis de nous tuer tous si on revenait parce qu'ils nous accusent de collaborer avec les FARDC", a déclaré Fazila Riziki, une mère de famille de 40 ans, sans nouvelle de ses proches.

Dans un communiqué, l'ONG Human Rights Watch (HRW) a demandé mardi aux parties impliquées dans les affrontements d'épargner les civils et à l'ONU de redoubler d'efforts pour protéger les populations.