Joseph Kabila, un an déjà : Bilan négatif... Un président "incapable de tenir sa promesse électorale"
La R.D.C toujours à feu et à sang...
Pour cela, avec l’accord de tous, j’annonce, aujourd’hui, la fin de la
recréation, afin que le Peuple puisse se consacrer entièrement au
travail et ce, dans la paix et la tranquillité. (...) J’entends avertir
que les prisons de l’Etat seront ouvertes à tous ceux qui se mettront
en travers de la loi’’. Le 6 décembre 2006. Deux phrases. Elles ont
retenti à travers le monde comme un signal fort pour un pays dont le
mal rimait avec la corruption et l’impunité. Aujourd’hui, cette clé du
discours d’investiture du chef de l’Etat résonne encore aux oreilles
des Congolais comme un catalogue de bonnes intentions.
Joseph Kabila entre jeudi 6 décembre dans la deuxième année de son
mandat de président élu. Et pour le juger, au-delà des promesses
électorales qui tardent à se concrétiser, son discours d’investiture
est l’absolu. Au regard de cet absolu, le bilan de cette première année
est largement négatif. De prime abord, les observateurs relèvent le
chantier oublié, c’est-à-dire la restauration de l’autorité de l’Etat.
Dès janvier 2007, la RDC est entrée dans une aire de souffrance
inédite.
La situation est allée de mal en pis. ‘‘Je vois un Congo où, chaque
jour, le peuple se remet au travail, renversant les paramètres de la
pauvreté, en chantier de prospérité... Aussi, mon mandat aura-t-il
également, comme socle, la trilogie bonne gouvernance – démocratie –
respect des droits de l’homme, qui sont les piliers principaux de la
gestion moderne de l’Etat et de la coopération entre les nations’’.
Rien de tout cela.
Le Congo souffre
Le mandat est émaillé d’un ensemble de catastrophes et d’accidents.
Aujourd’hui, la catastrophe s’est étendue sur tous les secteurs de la
vie nationale, traduite par les conditions de vie précaires pour la
majorité des Congolais. Le Coût de la vie insupportable a trouvé son
fondement dans le déficit de maîtrise des indices influençant les prix.
Sans compter les prix du carburant, ce qui est un paramètre exogène,
rien n’a encore été maîtrisé.
A Kinshasa, comme dans nos principales villes et campagnes, c’est la
galère. A tout point de vue. Pour son alimentation, le Kinois en est
réduit au pain sec et au beignet, à juste titre au surnom évocateur de
‘‘mbasu’’ ou ‘‘Kanga journée’’, du nom d’un beignet ou d’un pain qu’on
arrose avec un gros gobelet d’eau, si la REGIDESO ne fait pas ses
caprices pour permettre de passer la journée.
Les difficultés encore plus accrues des Transports, l’inefficacité de
fournir régulièrement de l’électricité et de l’eau potable, la
détérioration des voiries urbaines et des infrastructures routières, la
débrouille pour se faire soigner, l’abandon du secteur de
l’enseignement... un égrenage qui peut mener jusqu’au petit devoir d’un
gouvernement. Malheureusement c’est la cas.
La paix, encore une utopie
Le président Kabila a été élu sur base d’une promesse de paix. Elle n’a
jamais été offerte aux Congolais, particulièrement nos compatriotes de
l’Est. Puisque tant que le Kivu ne connaîtra pas la paix, la RDC ne
pourra se targuer vivre en paix. ‘‘En ce qui concerne la sécurité de
l’Etat, je rassure les Congolaises et Congolais de ma ferme volonté
d’éradiquer toute forme d’insécurité et de terrorisme urbain. Ce qui se
passe actuellement à l’Est du pays, avec les bandes armées qui n’ont
pas encore compris que ce temps est révolu, sera ma préoccupation
principale’’.
Jetés dans les routes du Kivu, près d’un million de nos compatriotes se
sont réfugiés dans la promiscuité des camps, dans des conditions
infrahumaines, sans hygiène et sans nourriture, à la merci des
épidémies et aux dépends des humanitaires, fuyant des violences qui ont
fait 5 millions de victimes. Nombre de Kivutiens ont subi des
humiliations insupportables et ne sont aujourd’hui en vie que parce que
la culture du suicide n’est pas congolaise. Des femmes continuent
d’être massivement et impunément violées, les hommes passent par le fil
de la lame des factions rwandaises qui ont importé leur culture de
tuerie dans notre pays.
Depuis une année, toutes les mesures prises pour désarmer le bras armé
tutsi et hutu du Rwanda en RDC se sont soldées par un échec. Le général
renégat, Laurent Nkundabatware poursuit sa campagne de harcèlement. Pas
plus tard que ce week-end encore. Avec ses 4 000 hommes, il nargue 20
000 soldats que le Gouvernement a amassés en face de lui. Quant aux
rebelles hutus rwandais des Forces démocratiques de libération du
Rwanda, les Rasta et toutes ces forces négatives qui écument le Kivu,
il faut compter jusque mars 2008 pour s’attendre à un début de
solution, à en croire le plan mis en œuvre par le gouvernement
congolais à la demande du Rwanda.
Les libertés fondamentales, denrée rare
La justice, les Droits de l’Homme, les libertés individuelles sont
encore des denrées rares miroitées au Congolais sans qu’il ne puisse
les goûter. ‘‘La lutte contre la pauvreté, l’injustice, les inégalités
sociales, la protection de l’enfant et de toutes personnes vulnérables
seront aussi au cœur de l’action du Gouvernement au cours des cinq
prochaines années’’. Cependant, divers rapports publiés sur le massacre
des adeptes de Bundu dia Kongo en février dans le Bas-Congo, sur les
affrontements au sein des FARDC entre la Garde présidentielle et la
garde rapproché de l’ex vice-président Jean-Pierre Bemba, les rapports
mensuels de la MONUC sur la situation des Droits de l’Homme en RDC, les
attaques sur la liberté de presse, etc. prouvent à suffisance que ce
n’est pas demain la veille pour la jouissance tant attendue des
libertés.
‘‘La justice doit lutter contre la puissance d’argent, des tribus, des
familles, d’amitié qui paralyse et asservit le magistrat et l’éloigne
de son devoir. Elle doit garantir la sécurité juridique et judiciaire à
tous les Congolais et les étrangers qui ont choisi notre pays comme
leur seconde patrie’’. En une année, la justice n’est pas toujours
distribuée de façon équitable.
Evoluant encore à deux vitesses, pour les riches et les puissants d’une
part, pour les gens de peu de l’autre, la Justice est gangrenée par la
corruption et a perdu son indépendance. Les rapts d’opposants suivis de
leurs détentions arbitraires sont encore monnaie courante, malgré la
promesse du président de réaffirmer ‘‘le statut constitutionnel de
l’opposition politique, qui doit jouer son rôle de contrepoids
institutionnel, et j’ai foi en l’attitude responsable qu’elle
affichera’’.
Les portes des prisons fermées pour les privilégiés
‘‘Mon rôle dans la nouvelle configuration institutionnelle est de
conforter la refondation de l’Etat et de susciter un véritable
électrochoc pour une révolution profonde des mentalités (...) Il en est
de même de la lutte contre l’impunité et l’immoralité politiques qui
sont malheureusement enracinées dans le sol politique congolais’’.
L’impunité poursuit son bonhomme de chemin. Plusieurs cas ont été
épinglés, notamment dans le drame des viols mais les plus en vue sont
l’implication indirecte du ministre d’Etat Nkulu Kilombo dans
l’accident de l’Antonov de Sam Aviation qui a coûté 50 vies mais aussi
également le bastonnade dont ont été victimes deux journalistes dans le
bureau du ministre Ngabu. Aujourd’hui, les deux personnalités siègent
dans le gouvernement malgré le remaniement, ce qui est perçu comme une
caution à l’impunité.
‘‘La lutte contre la corruption sera également un des segments
prioritaires de mon mandat... Elle est aussi une autre forme de
criminalité que je combattrai avec la dernière énergie‘‘. La corruption
continue également d’étendre ses métastases dans l’appareil de l’Etat.
Outre les détournements monstres signalés dans l’armée, la révision des
contrats miniers, l’audit diligentés par le gouvernement sur le
fonctionnement de l’appareil de l’Etat et plus récemment l’enquête sur
le déversement et la disparition de près de 15 tonnes de résidus de
cuivre hautement radioactifs au Katanga... se font dans une opacité de
plus troublante.
Le chantier oublié
‘‘L’Administration congolaise, jadis colonne vertébrale de l’Etat,
n’existe maintenant que de nom. Sous mon impulsion, un travail
rigoureux de réforme de cette Administration doit s’effectuer en même
temps que le renforcement des capacités institutionnelles de l’Etat et
des acteurs non étatiques pour, justement, s’attaquer aux causes
profondes de la mauvaise gouvernance’’. C’est justement le chantier
oublié de Joseph Kabila. Les réformes de la Fonction publique font long
feu.
Et le budget renvoyé à la Commission ECOFIN de l’Assemblée nationale
confirme le volume de l’enveloppe allouée à la paie des fonctionnaires
(dont un accroissement seulement de 10 %), insuffisant aux yeux des
syndicalistes. La contagion a pris dans le secteur des entreprises du
Portefeuille où les réformes sont bloquées pour de motifs politiques et
non d’efficacité.
Jusqu’à ce jour, les 5 chantiers sont encore en laboratoire, faute
d’ingrédients. En plus de USD 5 milliards chinois, les partenaires
traditionnels viennent d’afficher leur volonté d’y ajouter USD 4
milliards.
Kabila a encore heureusement quatre ans devant lui pour mieux faire.
C’est tout le mal que le Congolais lui souhaite. Mais le temps qui
n’arrête pas sa course, lui compte comme adversaire.
Losako/Le Révélateur